Lundi 17 juin 1940
Le soleil brille dans le ciel nazairien mais c'est une sombre journée qui va s'abattre sur l'estuaire de la Loire. Les armées alliées soumises à la pression de l'avancée allemande se ruent dans les ports de la façade ouest dans l'espoir de rejoindre l'Angleterre. Le port de Saint-Nazaire ne fait pas exception et des milliers de soldats et autres personnels attendent impatiemment d'embarquer. Une flottille de petites embarcations transfert les hommes des quais vers les navires ancrés non loin des côtes ou en approche. Parmi ceux-ci se détachent les silhouettes des paquebots Lancastria et Teiresias mesurant respectivement 169 et 139 mètres de long.
En milieu de journée les ponts du Lancastria sont combles et son capitaine attend une escorte pour prendre la mer. Le Teiresias n'est pas encore au mouillage et l'embarquement n'a pas débuté. Peu après 15h les premiers avions de la Luftwaffe apparaissent et donnent un premier assaut sans résultat. Le répit est de courte durée. Déjà de nouveaux appareils brillent au soleil. Durant de longues heures, les escadrilles ennemies vont se succéder bombardant sans relâche les nombreux navires.
Dès les premières minutes du combat, les avions fondent sur la proie la plus importante, c'est le Lancastria. Les bombes allemandes atteignant leur cible font un carnage. Elles éventrent les ponts, ouvrent de grandes brèches dans la coque et sèment la mort parmi les marins et passagers. La longue coque ne tarde pas à se coucher sur tribord. Les survivants se jettent à la mer et surnagent dans le mazout pour tenter d'échapper à l'enfer. Pris d'une folie guerrière, les pilotes allemands mitraillent les rescapés et larguent des bombes incendiaires dans le but d'enflammer le carburant qui recouvre la mer sans toutefois y parvenir.
Sur le Teiresias, les marins qui assistent impuissants au désastre vont à leur tour être rattrapés par les événements. Les appareils allemands se dirigent sur eux. Ils lâchent des premières bombes qui ratent leur cible et explosent près de la coque. Les ondes de choc causent néanmoins des voies d'eau et le paquebot ne tarde pas à prendre de la gîte. Profitant d'une accalmie du combat l'équipage met les canots à l'eau et évacue le navire. Certains d'entre eux restent à bord dans l'espoir de le sauver mais le bruit de la tôle rivetée cédant sous la pression de l'eau a finalement raison de leur courage. Les avions ne tardent d'ailleurs pas à revenir et achèvent le Teiresias qui sombre dans l'estuaire en fin de journée.
Les avions s'éloignent laissant derrière eux la désolation. Les bateaux affluent pour sauver les quelques rescapés qui ont échappé au carnage. Si l'attaque du Teiresias n'a pas fait de victime, Le Lancastria a subit la fureur de la guerre coûtant la vie à près de 4000 hommes et femmes. C'était le 17 juin 1940, la seconde guerre mondiale était commencée depuis quelques mois à peine et elle venait de montrer toute sa férocité.
Pour un récit plus détaillé et plus historique, je vous invite à ouvrir "Naufrages dans l'estuaire de la Loire" de mes amis Alain Foulonneau et André Meignen.
Après avoir fait le bonheur et le recueillement de nombreux plongeurs durant des années, le Lancastria est classé sépulture marine et interdit à la plongée depuis 2006.
Dimanche 21 juillet 2013
Indiqué par une bouée mal nommée Théresia, le Teiresias repose par une trentaine de mètres sur le fond de l'estuaire... là où l'eau n'est pas souvent claire et où la visibilité peut parfois être nulle. L'épave est à la taille du paquebot : grande ! Malgré les dynamitages effectués pour dégager le chenal, de gros morceaux de navire attendent les visiteurs sous-marins. Treuils, mâts, énormes pans de tôles... et chose rare dans le secteur, il est possible d'entrer à plusieurs dans les cales et la machine. S'y promener est d'ailleurs un moment assez ludique. Sur l'extrême arrière, une pâle d'hélice émerge du sable. Les détails navals du Teiresias sont très nombreux et faire la visite complète de son épave requière plus d'une plongée. Lorsque vous visiterez ce lieu, n'oubliez pas qu'il est historique !
Commenter cet article